Épisode 5 : Les Ombres surle Sentier

  Nous retrouvons donc nos aventuriers dans le village d’Eau-Forte après leur sauvetage du chasseur. L’ayant sauvé in extremis de l’attaque des trolls, ils étaient rentrés se reposer à l’auberge après l’avoir confié au bon soin d’Herberta l’herboriste, sa mère.

  C’est après une bonne nuit de repos que nos héros se réveillèrent frais et dispo pour la suite de leur aventure. Sur les conseils de Gary, il se mirent en quête de trouver l’espion du professeur Hexen qui saurait sans doute leur donner des informations au sujet des nouvelles ruines à explorer et de l’éventuelle profit à rejoindre la faction rivale du professeur Traboul. Amélie, convaincue d’avoir trouvé en un villageois ivre mort de la taverne la personne de l’espion, entreprise d’obtenir toutes les informations possible de ce dernier. Après une longue conversation, et un pot de vin littéralement payé en pot de bière, elle obtint de cet insoupçonné informateur la localisation précise d’un précieux et mystérieux bosquet à champignons. Il ne fut pourtant pas difficile aux autres aventuriers de trouver le véritable espion, celui-ci ne cherchant pas particulièrement à être discret et semblant même chercher à attirer leur attention.

  Il était tout à fait disposé à leur révéler les informations nécessaires après avoir lu la lettre de Gary qui leur servait de recommandation. et leur indiqua donc que le site de fouille se trouvait dans un col de montagne au-dessus d’un village appelé Frostdelv, qui était un village minier plus haut dans les montagnes et situé à 3 jours de marche.
  Il leur donne à l’itinéraire, mais il voulu leur vendre plus d’informations en échange de rémunération. Amlash refusant de se séparer de la moindre richesse, tenta plutôt de le convaincre de se montrer généreux et de leur donner les informations sans compensation financière. Ces négociations vouées à l’échec furent sauvées par la magie, et ils finirent par le forcer à me la révéler ces dernières informations. Ainsi, l’espion leur apprit que Frostdelv se trouvait en haute montagne et qu’il leur faudrait être chaudement équipée sous peine de finir congelé. Il leur apprit également que de nombreux monstres s’étaient mis à parcourir la région, bien plus nombreux qu’auparavant, et que ceci semblait être devenu plus agressif pour une raison mystérieuse. Il leur rapporta enfin que de nouvelles espèces de monstres, jamais vues auparavant, semblaient rôder dans les sentiers les plus reculés de la montagne.
  Au moment de les quitter, il réalisa finalement qu’il avait été ensorcelé, et exigea d’être récompensé pour ses informations. Il les informa qu’il avait cherché à les rencontrer afin de pouvoir faire un rapport au Professeur Hexen, et que celui-ci serait très mauvais à moins qu’il ne soit justement rémunéré. Oblitius intervint, et paya l’homme une somme suffisante pour changer sa grimace hostile en un sourire cajoleur.

  Avant de quitter le village, les aventuriers tentèrent tout de même de mettre à profit l’information d’Amélie au sujet du bosquet de champignons, et se mirent en quête de celui-ci. Ils y trouvèrent effectivement plusieurs herbes rares qui leur seraient certainement utiles en décoction contre les poisons. Amélie trouve à elle un fort beau spécimen de champignon d’une jolie couleur rouge vive dont elle fut très fière.

De retour sur l’herboriste où ils furent accueillis en héros, ils identifièrent leurs plantes. Malgré les protestations d’Amélie, Oblitius enchanta le champignon pour lui donner une apparence magique au moyen d’un sortilège d’illusion; Herberta l’herboriste fut grandement perturbée par l’apparition de ce champignon qu’elle ne connaissait pas, tant à cause de sa couleur violette iridescente que de son scintillement. Elle supplia Amélie de lui remettre en échantillon afin de pouvoir l’étudier, ce que le paladin fit à contre-cœur.

Profitant de leur présence dans la boutique pour faire quelques emplettes et acheter quelques potions de soins, ils interrogèrent également le chasseur sur les dangers de la montagne.
Celui-ci, infiniment reconnaissant de leur sauvetage, offrit à Grimelitt une amulette de cicatrisation, qui permettait à son porteur de guérir de ses plaies à une vitesse magique. Il leur apprit également l’existence d’un sentier connu seulement des chasseurs, qui leur permettrait de rejoindre Frostdelv en deux jours de marche au lieu de trois. Ce sentier empruntait un pont de corde au-dessus d’un ravin afin d’éviter un détour par la vallée et traverser la rivière de Mirabilis. Il les mit lui aussi en garde sur les monstres rôdant dans la forêt, tant ceux de l’écosystème habituel qui semblait être devenu plus agressif, que les nouvelles créatures encore inconnues qui semblaient avoir envahi la montagne. Avec ces informations, les aventuriers se mirent finalement en route.

  Empruntant donc le sentier du chasseur, il marchèrent pendant la journée entière en direction de l’est, parcourant la forêt et les flancs des montagnes. Le temps clément de cette saison printanière les accompagnant, ils marchèrent d’un bon pas, sans s’arrêter sur la beauté de la nature, regardant de temps à autre les nuages menaçant qui semblaient déverser des flots de neige sur les pics ornant la région.

En fin d’après-midi, ils trouvèrent à l’orée d’une clairière le signe d’un sombre massacre. Six humains vêtus de vêtements de tissu et de cuir gisaient éventrés sur le bord de la route. Ils ne semblaient pas avoir pu opposer la moindre lutte à leur agresseur.

  Inquiète, Amlash utilisa un sortilège de communication avec les plantes pour interroger un grand sapin sur la tournure des événements. Celui-ci accepta de répondre à leurs questions après Oblitius n’ait désintégré d’un claquement de doigt un pic-vert qui avait élu domicile dans ses branches.

Il leur raconta ainsi le massacre unilatéral des bandits par un clan de dryades en quête d’un nouveau bosquet où élire domicile après avoir été chassé du précédent par un monstre redoutable récemment apparu dans la région. Ainsi, d’après l’arbre, le groupe de bandit était en fuite après que leur campement ne fut détruit par les fées, ce qui expliquait l’odeur de cendre que les aventuriers humaient depuis un peu plus tôt.

  Nos héros furent très préoccupés d’apprendre qu’une créature suffisamment puissante pour mettre en fuite un clan de dryade rodait dans la région. C’est donc avec la plus grande précaution qu’il se remit en route sur le sentier menant vers Frostdelv, juste après qu’Oblitius n’utilise son sort favori pour réanimer un des corps qu’il baptisa Darius.

Quelques heures de marche plus tard, la route s’inclina vers l’aval et ils arrivèrent en vue du pont dont le chasseur leur avait parlé. Néanmoins, leur surprise fut grande de constater qu’il ne s’agissait pas comme attendu d’un pont de corde bricolé par les braconniers de la région, mais d’un somptueux pont de pierre blanche enjambant le ravin. Troublé par cette découverte, il redoute une illusion… Mais le pont était bien réel, constitué d’une pierre solide, et semblait avoir toujours été là… Ils découvrirent une énigme ornant le pont, écrite de runes nordiques qu’il parvinrent à traduire grâce aux instructions laissées par Thundral.

Poème du Pont

Dans l’ombre du pont, où le destin se tisse,
Quatre gardiens de pierre, dans l’écho du silence.
Leur sagesse, courage, ruse, et ambition,
Guide nos pas, dans la quête de notre mission.

Odin, l’écho du savoir, se tient fier et sage,
ses corbeaux veillent, gardiens de son héritage.
Dans le murmure du vent, leurs ailes dans l’orage.

Tyr, bras sacrifiés pour lier le Grand Loup,
Brave parmi tous, son courage garde de tout.
Son cri résonne, dans la bataille un éclat doux.

Loki, silhouette risée, sourire en coin,
le serpent siffle, complice de ses dessins.
Dans l’ombre il danse, maître de l’art malin.

Skirmir, simple gardien devenu dieu,
l’ambition du pouvoir brille dans ses yeux
Son faucon s’élance, ailes déployées vers les cieux.

Quatre âmes devant le choix, une traversée en balance,
Sous l’égide de ces dieux, doivent trouver leur essence.
L’harmonie dans le choix, la clé de l’avancée,
Sous la protection divine, leur destinée est tracée.

Que chacun s’avance, sous le regard de son protecteur,
Dans cette danse des âmes, trouver sa valeur.
Prenez garde toutefois à chacun de vos pas
À ne pas vous tromper, car si c’est le cas
pour chasser l’intrus, le gardien s’animera.¹

  Ainsi, les aventuriers comprirent qu’il leur fallait traverser le pont chaque à leur tour, en choisissant une des statues divines comme protectrice pour passer en sécurité. Le pont comportait quatre statues représentant ces Dieux accompagnés de leurs animaux fétiches, ainsi qu’une cinquième les surmontant, difforme et menaçante.

  Amélie s’est lancée la première, choisissant naturellement de se placer sous la protection de Tyr, le dieu du courage. Au moment où elle marchait, la statue sembla reconnaître sa présence et l’accepter. Elle passa ainsi sans encombre. De même, Grimelitt se plaça sous la protection d’Odin et traversa lui aussi sans encombre. Ensuite, Amlash hésita un moment entre Loki, Dieu de la ruse, et Skimir, Dieu de l’ambition, avant de choisir Loki comme son patron. Ce fut un bon choix et elle passa sous le regard moqueur de la statue qui semblait lui sourire.
  Oblitius, ignorant quel choix avait fait Amlash, ne sut pas dans quel dieu se reconnaître. Il se tourna finalement timidement vers Loki, qui lui refusa sa protection. Ainsi le piège du pont se referma sur nos aventuriers, et la cinquième statue s’anima dans un rugissement glaçant.

Les aventuriers se précipitèrent de l’autre côté du pont pour prendre une formation de combat et affronter la bête qui jaillit de la pierre. La gigantesque créature avait un corps de loup, des pattes de corbeau, et une longue queue de serpent. Les deux têtes d’aigle de la bête rugirent à l’unisson, et le monstre leur barra le passage d’un bon: il leur faudrait combattre pour passer.

  Amélie et Gremelitt se précipitèrent au contact de la monstruosité, tandis que Amlash et Oblitius se tinrent à distance pour lancer leur sorts. La chance fut de leur côté, et la créature de pierre semblait si lente qu’elle ne réussit pas à les blesser. En effet leur travail d’équipe eut rapidement raison de la bête et il triomphèrent rapidement. Ce fut Grimelitt qui l’acheva, traversant de par en par le torse de la créature d’un coup puissant de poing.

  La créature s’effondra en un tas de poussière qui se dissipa dans le vent, ne laissant aucune trace de sa présence, disparaissant aussi vite qu’elle n’était apparue.
Amélie remarqua toutefois deux petits diamants briller dans le tas de sable laissé par leur adversaire, mais avant qu’elle n’eut le temps de les ramasser, elle fut devancée par Amlash qui rafla le butin sous ses yeux. Ces deux petits cristaux, chaud au toucher, brillant dans le noir, d’une couleur opaline, et dont la forme semblait changer au creux même de sa paume. Elle se sentit imbuée d’un pouvoir colossal : celui de réussir absolument tout ce qu’elle pourrait entreprendre. Elle dissimula le trésor au creux de sa bourse.

Après ce combat triomphant, les aventuriers se remirent en route. Il leur restait encore un peu de chemin à faire pendant cette journée, et il leur fallait trouver un endroit où bivouaquer pour la nuit. Continuant leur route quelques heures, ils finirent par s’arrêter auprès d’une petite cascade isolée dans la forêt. Là, ils montèrent le camp et se préparèrent à se reposer.

  Pendant que les autres avaient le dos tourné, Amlash glissa une fiole de somnifère dans la nourriture qu’elle s’était proposée de préparer pour tout le monde, et afin d’en assurer le fonctionnement, se mit à chanter une berceuse auprès du feu. Même Grimlitt, normalement résistant aux sorts de sommeil magique, se laissant entraîner par la fatigue et s’endormit. Amlash entreprit donc à nouveau de faire le tour des poches de ses infortunés camarades, et chercha une fois de plus à percer le secret de l’identité d’Oblitius, sous les grognements de protestation de Darius. Elle fut si absorbée dans sa tâche qu’elle finit par oublier de surveiller les alentours.

  Une branche craqua finalement, la faisant se retourner face à une gigantesque louve, et quatre autres de taille plus normale. Elle sonna l’alerte, mais ses compagnons endormis s’éveillèrent trop lentement pour se préparer à l’attaque.

  Les loups n’étaient pas des bêtes comme les autres. Dans les traces de leur passage, ils laissaient un sillon de givre qui gelait le sol et le rendaient glissant, et leurs crocs mordaient de froid.

Un tourbillon de griffes et de morsure s’abattit sur Amlash, mais alors qu’elle faillit être dévorée par la matriarche de la meute, Amélie s’interposa et fit rempart. Grimelitt sembla s’envoler dans les airs pour retomber chevauchant la louve et la rouer de coups un instant, mais celle-ci se retourna et le goba presque entier, ne laissant dépasser que le bas de son corps. Oblitius saisit cette occasion pour lancer un sort de boule de feu au milieu des assaillants. Il engloba dans la déflagration Amlash, qu’il accusait à raison de la précarité de la situation, et Grimelitt qui était toujours dans la gueule de la louve. Lorsque le feu lécha le fondement du nain rendu aveugle par sa localisation, ce dernier choisit inconsciemment d’y sentir la brûlure du froid et d’ignorer l’évidence de l’incendie monumental qui embrassait leurs ennemis. Au contact des créatures, les flammes semblaient changer de nature et devenaient plus sombres, attisées par le pouvoir d’Oblitius et brûlant les créatures malgré leur résistance au feu. Les nuages de vapeur dissipés dévoilèrent que les assaillants avaient fondu.

La situation semblait revenir à l’avantage des aventuriers, lorsqu’il réalisèrent qu’un des loups s’échappait et appelait des renforts. De nouveaux assaillant se pressaient à l’orée de la clairière !

Redoublant d’efforts, Amlash se mit hors de portée des créatures par une foulée brumeuse. Grimelit s’arracha à la gueule du monstre pour reprendre ses attaques, et Amélie redoubla de férocité ! Enchaînant leurs coups avec une synchronisation héroïque, ils repoussèrent une nouvelle fois les créatures, et Amélie trancha la teste de la louve, mettant la meute en fuite.

  Le calme revenu, les aventuriers épuisés et furieux accusèrent Amlash et lui demandent des comptes. Elle nia tout, mais Oblitius ne fut pas dupe, le doute étant levé par le doigt pourri mais accusateur de Darius. Ils décidèrent que pour réformer les pratiques égoïstes et vicieuses d’Amlash, elle devait prier avec Amélie tous les soir jusqu’à ce que la spiritualité ne la touche et ne fasse d’elle une alliée sur laquelle on pourrait compter. Celle-ci feint de se prêter au jeu, et l’histoire en resta là, Amélie et Grimelitt trop désemparés par ces trahisons à répétition pour savoir comment réagir.

  Dès l’aurore, ils se remirent en route, et atteindront bientôt Frostdelv, épuisés par la route. Le village de pierre et de maisons basses leur sembla tel un havre de paix, et ils prirent à peine le temps de s’intéresser aux rails qui parcouraient la ville des mineurs, se ruant à la taverne la plus proche pour chercher refuge.

  Ainsi les aventuriers avaient par deux fois croisé la route de monstres dont l’existence leur semblait contre-nature, bouleversant l’ordre des choses… et ils avaient vu de leurs yeux les conséquences de la mutation du monde, bouleversant l’écosystème de la région et poussant certaines créatures à l’agression. Il leur fallait faire vite, et comprendre comment protéger l’ordre naturel des choses, car ce qui se préparait dépassait leur entendement.